« Cette histoire de se passer la balle en arrière pour aller de l’avant, franchement, quand on y réfléchit… »
Quel bonheur de se plonger dans cette chronique villageoise ! Entre mai et septembre 1967, nous allons suivre une brochette d’habitants de Castelau et de Laroque, deux bourgs situés entre Montauban et Toulouse, seulement séparés par une rivière, unis par l’amour du rugby mais par là même également rivaux. Ceci dit, les deux équipes ne brillent pas par leurs résultats et se retrouvent souvent en bas du classement. Le rugby donc, rythme la bande dessinée mais nul besoin d’être adepte du ballon ovale pour la savourer (ouf). Les personnages, nous les connaissons déjà, ce sont des archétypes : l’instituteur communiste, la patron d’usine qui aurait préféré que sa fille fasse sup’ de co’ plutôt que le CREPS, le curé qui se fait entraîneur de rugby, la jeune fille qui monte faire ses études à Paris, le réfugié politique grec… et nous avons beaucoup de plaisir à les voir vivre ensemble. On suit plus particulièrement Yveline et Monique, deux jeunes filles qui s’émancipent chacune à sa façon mais sont bien décidées à faire leurs propres choix. Il n’y a pas d’intrigue à proprement parler, c’est une tranche de vie à une époque charnière ; la fin d’un monde se dessine, les prémices de mai 68 sont là.
Il y a de la douceur dans cette BD, de l’humour de la tendresse mais pas de nostalgie. Les nombreux clins d’œil aux années 60 nous font sourire : on entend Richard Anthony et Les Beatles, le dessin plante le décor : 2 CV et déesse traversent les cases, formica et meubles mado participent à créer l’ambiance. Je ne m’attendais pas à être embarquée aussi vite, le rugby me faisait douter ! C’est donc une belle surprise, qui n’est pas sans nous rappeler « Magasin Général », série dont Jean-Louis Tripp était aussi l’un des auteurs.
Fabienne