« Rousse se rappela leçon de Noirciel, qui était Maître, qui savait. Mort est fin, vie est chemin. Rousse, errante renarde cherchant elle ne savait quoi, montrait par sa persévérance, de quel côté penchait son cœur »
Rousse ou Les beaux habitants de l’univers se présente sous d’heureux auspices puisque l’auteur emprunte le sous-titre à Jean Giono (il le cite aussi en exergue), et en effet dès les premières pages nous savons que nous tenons-là un petit bijou. Rousse est une intrépide et jeune renarde, née au Bois de Chet. Les humains, dont il n’est pas question ici, si ce n’est quelques allusions tacites, ont disparu mais la terre porte encore les stigmates de leur passage : pollution de l’eau, sécheresse… Au Bois de Chet, les animaux souffrent de la soif, la paix est fragile et certaines espèces sont décimées : c’est toute la chaîne du vivant qui est en danger. Aussi, Rousse choisit-elle de s’en aller, en suivant le fleuve, en quête d’une terre d’abondance, un havre imaginaire, au loin dans les montagnes. Très vite cependant, elle comprend que ce but avoué est surtout le prétexte à courir le monde ; à la destination finale, elle préfère le voyage. Un périple peuplé de rencontres, bonnes ou mauvaises, de joies, de renoncements et de pertes, mais de chaque épisode Rousse sort grandie et éclairée sur la marche du monde.
Il fallait une langue particulière pour que le lecteur se sente renarde au moins le temps de la lecture, qu’il pense et ressente comme Rousse : Denis Infante y parvient avec brio, une écriture déliée, gracieuse, à l’image notre goupile. Un roman animalier plein de panache et d’allant, dont on ressort ragaillardi car oui, avouons-là, un roman sans humains, même s’il file la métaphore, c’est parfois reposant ! Un premier roman étonnant qui respire la joie « d’être au monde, parmi créatures vivantes ». Bonne nouvelle, à ce qu’il paraît, l’auteur en a beaucoup d’autres dans ses tiroirs !
Fabienne