« J’ai 31 ans, mais j’aime bien qu’on m’appelle mon garçon. C’est peut-être parce que les années ont passé plus vite pour moi que pour les personnes ordinaires. Je ne suis pas ordinaire, et je ne suis pas vraiment un garçon. J’ai 31 ans. Je devrais être un homme, mais je me sens comme un petit garçon »
Voici l’histoire de Bobby, racontée par lui-même. Sujet à des crises, submergé par des émotions fortes, sa relation au monde est «différente». Il reste à la merci d'un beau-père tyrannique lorsque sa mère meurt. Le «Gros» l’enferme, le gave de cachets et projette de le faire enfermer afin de devenir seul légataire du grand magasin laissé en héritage. Mais Bobby s’enfuit, direction la Cornouailles. Le routier qui le prend en stop, par jeu, écrase un lapin mais provoque ce faisant un accident dont il ne réchappera pas (karma). C’est là que Bobby rencontre Mr Summers, un petit homme providentiel bien étrange, qui accepte de l’emmener avec lui et l’initie au travail : le long des chemins, il ramasse tous les petits animaux tués par des voitures et les enterre à l’aide d’une truelle. Une nouvelle vie pour Bobby, une renaissance même : auprès de Mr. Summers, il est reconnu en tant que personne, n’est plus le «débile» du Gros. Le vieil homme, tout taciturne qu’il est, prend soin de lui sans condescendance, avec frugalité, le rend sensible à la nature et lui rend son humanité, ne serait-ce qu’en l’appelant par son prénom. Mais bien-sûr, le Gros n’en a pas fini avec Bobby…
Paru à Londres en 1968, les éditions de l’Arbre Vengeur nous refont découvrir Tous les petits animaux cette année ; ce court roman, illustré par Mehdi Beneitez se lit d’une traite et n’a rien perdu de sa force, presque 60 ans plus tard. Il interroge la violence, le Bien et le Mal, la société de consommation et la liberté avec une acuité d’autant plus marquante que l’écriture est innocente, naïve. On suit Bobby et Mr Summers dans leur vagabondage, on fait un pas de côté avec eux vers les marges, en se disant qu'il est bon parfois d’être bousculé ! Et l’envie bien-sûr, de partager cette trouvaille ;)
(Fabienne)