« La haine est un trésor étrange, mais Vance n’en avait pas d’autre »
Nouveau Mexique, fin du 19ème siècle. Temple Caddy Jefford est à la tête d’un immense empire financier, propriétaire du ranch de Birdfoot. Veuf, il est le père de deux fils, mais c’est sa fille Vance, douée du même tempérament combatif que lui, qu’il destine à prendre la relève, à condition qu’elle renonce à quelques aspirations, comme se marier par exemple. Elle doit se vouer corps et âme au domaine et suivre les pas exacts de son père : Vance accepte, du haut de ses 19 ans. Le père et la fille s’aiment d’un amour assez troublant, il y a quelque chose d’incestueux dans leur relation ; elle est sa fierté, il est son modèle ; elle le vénère et alors que Temple est souvent absent, c’est elle qui tient véritablement les rênes du ranch ; devenue aussi redoutable que lui en affaires, elle n’hésite pas, pour satisfaire les banques à faire expulser dans le sang les Mexicains installés depuis des générations sur leurs terres. Mais voilà qu’au retour d’un voyage, Jefford revient avec une femme à Birdfoot, une jolie rousse de 40 qui très vite prend ses aises au ranch et se comporte comme la maîtresse de maison : une rivalité s’installe entre les deux femmes. Quand Flo annonce à la jeune fille, son intention d’épouser son père, c’est le drame. L’amour filial est détrôné par une haine farouche, et après quelques funestes évènements, c’est la revanche qui guidera Vance ; pour une fois, Temple Jefford trouvera un adversaire à sa taille : il faut dire qu’elle a été à bonne école…
Les Furies, titre en référence à ces divinités romaines qui rendaient justice en châtiant les coupables, est un excellent western, au féminin peut-on dire. Ce sont trois femmes qui, ici, incarnent la puissance (Vance bien-sûr mais aussi sa mère dont l’esprit imprègne encore les lieux, et Flo, une intrigante avide de richesse), elles détiennent les clés pour installer ou renverser une situation. Un roman sur l’amour, la trahison et la revanche, les représailles éclateront de part et d’autres, chacun paiera sa part (certains plus que d’autres). Dans un décor superbement planté, Niven Bush rappelle aussi un pan d’histoire américaine, la colonisation des Territoires par les Blancs, « un pays exploité jusqu’à la corde par une poignée d’hommes d’affaires » de l’espèce de Temple. Un roman magistral sur les passions humaines, cruel, sauvage et furieusement addictif !
(Fabienne)
« Temple Jefford n’avait jamais pensé à la mort ni à la faillite. Toutes deux lui apparaissaient comme des choses vagues – des contingences morbides qui ne concernaient que les gens faibles, dénués de volonté ou de cran »
Dans la même collection, "L'Ouest, le vrai", dirigée par Bertrand Tavernier :