chateau des animaux« Utiliser vos crocs ou vos griffes pour obtenir votre liberté revient à dire que vous espérez récolter une rose en plantant des orties »

Derrière l’enceinte du château des animaux, chats, poules, moutons et autres bêtes, asservis par un taureau redoutable, le président Silvio, triment toute la journée pour une maigre pitance et après s’être crevés à la tâche, ils doivent remettre une partie de leurs gains au silo collectif. La terreur règne, et chaque soupçon de contestation est injustement réprimé : considérés comme des traîtres à la République des animaux, les supposés dissidents sont condamnés au poteau de justice et livrés aux crocs de la milice, des dogues terrifiants et volontiers sanguinaires ; la poule Adélaïde et l’oie Marguerite en feront les frais. Pour asseoir son autorité Silvio prétend protéger son peuple des loups qui rôdent à l’extérieur et menacent chaque jour la communauté : la peur n’est-elle pas le moyen le plus efficace pour museler le peuple ? Dans ce contexte, Miss Bengalore, une chatte qui élève seule et difficilement ses petits depuis la disparition subite de son mari, est totalement soumise et l’idée d’opposition ne l’effleure même pas, trop occupée à protéger et nourrir ses chatons. Mais voilà que débarque au château un rat conteur, qui, à travers des histoires, insuffle petit à petit le désir de justice et de liberté et réveille le souffle de la contestation parmi les plus apeurés : Miss B. et César, un lapin gigolo. Ce duo improbable, inspiré par le rat, mène des actions non-violentes et pleines d’humour pour « rendre l’injustice visible et faire cesser la peur » : « Silvio et ses chiens savent se battre contre un lapin ou contre une poule en colère… pas contre le ridicule »

Si le scénario n’est pas nouveau, peu importe : son traitement en revanche, très personnel, est une réussite, les dialogues sont vifs, entraînants, drôles parfois, notamment entre Miss B. et César, qui n’étaient pas destinés à se fréquenter mais vont contre toute attente nouer une complicité qui ravit le lecteur. Le dessin est superbe, les animaux ont tous des trognes très expressives qui reflètent leurs émotions ou leur personnalité mieux que ne le feraient les mots ! L’hommage à Orwell et La Ferme des animaux est revendiqué dès la préface mais les auteurs vont plus loin, faisant référence à Gandhi, Luther King ou Mandela ils affirment leur confiance dans la capacité de chacun à résister pour secouer le joug de l'oppresseur ! C’est beau, c’est réjouissant, on est ragaillardi à la fin de l’épisode : vivement le tome 2 !!

(Fabienne)

 

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