« Moi, quand je cherche à m’enfuir de ma vie, je me réfugie sur mon téléphone, un bouclier de virtualité pour me permettre de gérer le vrai monde »
C’est la fin des vacances, Victoire devrait rentrer en terminale mais durant l’été son corps s’est transformé et elle ne se reconnaît pas dans ses nouvelles formes. Faire face aux autres élèves lui semble insurmontable et elle décide de sécher les cours dès le 1er jour, prétextant être malade. Elle retourne alors dans le monde virtuel qu’elle s’est créé l’été : sa vie sociale est réduite aux réseaux sociaux, elle poste des vidéos et se dissimule derrière les filtres qui gomment son apparence. Bien-sûr, après quelques jours d’absence au lycée, la supercherie est découverte et ses parents pour contrer le mal-être qu’ils découvrent chez leur fille (sans en imaginer pour autant la profondeur) décident de lui faire reprendre pied dans la réalité en l’envoyant faire les vendanges, avant les cours (qu’elle s’engage à suivre) et pendant les week-ends. Pas vraiment une punition, plutôt une solution pour « faire une pause et découvrir autre chose ». Victoire a refusé la main tendue de sa meilleure amie qui avait compris que quelque chose n’allait pas : à force d’être repoussée, elle a fini par prendre ses distances. Aux vendanges, elle se fait de nouveaux amis, ils sont drôles, accueillants mais leur conception de la fête et leur rapport à l’alcool a quelque chose de malsain qui pourrait bien cacher des traumas enfouis. Quand à Gaëtan, le fils du vigneron, mystérieux sous sa capuche, violent à l’occasion et de toute évidence immensément malheureux, mieux vaut éviter de croiser sa route. Une histoire de deuil et de culpabilité les lie et Victoire va s’y trouver mêlée malgré elle.
Un chouette roman, l’humour vient contrebalancer des thèmes par ailleurs durs et très contemporains (dépendance à la réalité virtuelle, souffrance dans son corps, alcool, deuil). Les dialogues entre Victoire et sa mauvaise conscience (surnommée Défaite), d’abord cruels vont évoluer au fur et à mesure que la jeune fille ira mieux, devenant drôles, jusqu’à l’apaisement. Bretzel Break c’est aussi une romance construite autour du trope « ennemies to lovers » , on le comprend très vite mais peu importe, c’est le chemin qui compte 😊. A noter, une scène de premier baiser qui romantise avec finesse le consentement, quelques séquences « émotions » qui flirtent avec le mélo sans basculer dans la sensiblerie. C'est sûr, l'autrice a le sens du romanesque, il y a des rebondissements à foison et on passe du rire aux larmes sans transition ! Si j’ai aimé le personnage de Victoire, une ado qui s’attire toute notre sympathie, j’ai aussi beaucoup aimé sa mère, personnage secondaire voire tertiaire du roman, magnanime, juste, digne de confiance. Un très bon moment de lecture dès 14 ans.
Fabienne