« Je suis fini, liquidé. Une vie qui bascule, un univers qui s’éteint »
Et derrière les nuages, c’est l’histoire d’un drame, de ceux qui dévastent une vie mais c’est aussi l’histoire d’une reconstruction. Nous sommes à Chamonix, Antoine et son meilleur ami, narrateur de l’histoire, viennent d’obtenir leur bac. Passionnés de montagne, ski pour le premier, escalade pour le 2nd, ils décident de fêter l’événement par l’ascension de l’aiguille d’Argentière, un pic pas trop difficile mais le narrateur ambitionne de devenir guide de haute montagne et pour réussir l’examen, il doit avoir parcouru 39 randonnées. L’escalade a été bien préparée, ils n’ont commis aucune imprudence, le narrateur est conscient des dangers de la montagne mais hélas, arrivé au sommet, Antoine a la mauvaise idée de se désencorder pour avaler son sandwich un peu plus loin : c’est l’erreur fatale, il chute et s’écrase au fond de la vallée sous les yeux de son ami. Au-delà de la tristesse, c’est la culpabilité, le remord et la honte qui terrassent le jeune aspirant guide, d’ailleurs il renonce à son rêve. Juste après l’enterrement, il quitte la montagne et part, sans projet et complètement paumé à Lyon. Là, il sera repêché par Leïla, en errance elle aussi : elle fuit un père qui la prive de liberté et prétend choisir sa vie pour elle. Ils se lient d’une amitié solide, trouvent un squat et petit à petit, la future étudiante en khâgne le fera renouer avec la vie, et peut-être même avec la montagne.
Ce roman est en fait le journal tenu par le narrateur juste après la mort d’Antoine, écrire sera pour lui une sorte de catharsis, il écrit dans une langue abrupte, rugueuse, sobre aussi, il ressasse sa culpabilité. Le souvenir de l’accident obsède le narrateur, ce qui se traduit dans l’écriture qui a souvent une double lecture, les métaphores liées à la montagne sont récurrentes. Des images violentes, celle du corps écrasé d’Antoine, tâche rouge et bleue sur la neige, son hurlement poursuivent le jeune homme et reviennent comme un leitmotiv. La forme du roman, le « je » donnent un caractère très intimiste au texte, le lecteur est très proche du narrateur et de ses émotions. Un sujet très dur, un texte à fleur de peau traité sans complaisance mais avec néanmoins beaucoup de délicatesse et de justesse, qui n’est pas sans rappeler Brise-glace de Jean Philippe Blondel.
« La récitation au sens scolaire du terme tue la poésie, elle l’enferme dans un cadre et lui donne des explications, alors qu’il y a besoin de papillons, de bonheur et de clins d’œil pour l’apprécier »
(Fabienne)